Fin de vie : « Qu’est-ce qui est digne ? » - Pour La Croix, les philosophes Olivier Abel et Laurence Devillairs accompagnent de leurs réflexions les travaux de la Convention citoyenne sur la fin de vie. Cette semaine, Laurence Devillairs explore la notion de dignité.
Il faut se méfier des mots devenus intransitifs. Sans complément d’objet ni finalité, la « dignité » se prête à de multiples interprétations : elle peut être un devoir aussi bien qu’un dû. Sur quoi peut-elle bien porter : ma vie, ma personne, ma capacité à agir, à décider ?
L’article premier de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 affirme que « tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits ». Déjà, dans le Préambule, il est souligné que « la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde ».
Ce qui est digne en chaque homme, c’est son humanité. C’est elle qui commande la revendication de droits ; c’est elle qui fonde les valeurs de justice, de paix et de liberté. L’humanité n’est donc pas une valeur parmi d’autres, mais ce qui conditionne toute valeur. Pas de justice sans souci de l’humanité, pas de paix sans respect de l’humanité, pas de liberté contraire à l’humanité des hommes.
La dignité n’est donc pas intransitive, puisqu’elle fonde les valeurs de justice, d’égalité, de liberté et de paix, mais elle est inconditionnelle : l’humanité de chaque homme est un absolu non négociable. Tout lui est subordonné. Aucun droit, aucune politique ne doit pouvoir se substituer à ce respect pour l’humanité de chaque homme, à tout moment de son existence.
Toute notre dignité, notre mérite et notre devoir, est de penser, déclarait en son temps Pascal, parce que, par la pensée, je comprends l’univers qui pourrait sans cela « m’engloutir comme un point ». Ce qui est digne, c’est en chaque homme le fait qu’il est une personne, et non « un point », une simple unité numérique. Cette dignité est indépendante de toute autre considération, qu’elle soit physique ou sociale.
Source : la-croix.com
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La philosophe, Florence Devillairs, revient avec justesse sur la notion de dignité dans le cadre du débat sur la fin de vie. En repartant des bases juridiques, elle explique que la dignité est inhérente à la personne humaine et inconditionnelle, elle ne peut donc pas être aliénée par la capacité d’agir ou non. Il est bien triste de considérer la dignité non pas à l’aune de la personne mais de sa capacité à contrôler sa vie. Peut-être faudrait-il revenir aux fondamentaux. Une société qui organise le meurtre et le suicide n’est pas plus humaine, mais certainement plus inhumaine.