Communiqué de presse

3e Plan National de lutte contre la traite des êtres humains : Deux ans de retard, mais une meilleure écoute des associations

Le 3e Plan National de lutte contre l’exploitation et la traite des êtres humains a enfin été rendu public lundi 11 décembre 2023, après plus de deux ans d’attente, le 2e Plan ayant expiré en octobre 2021. Alors que plus de 4300 victimes de traite ont été repérées par les associations en France en 2022, une stratégie à 4 ans paraît un instrument de lutte nécessaire pour endiguer ce fléau. 

Si le plan manque d’ambition à la fois sur les mesures transversales et les mesures thématiques, ce sera à la mise en application qu’il conviendra de juger de son efficacité. Pour rappel, seulement 3 mesures sur les 44 du plan précédent ont été effectivement mises en œuvre. Ce nouveau plan reprend donc en grande partie ces mesures restées lettres mortes. 

Cependant, nous voulons souligner l’effort pour impliquer les associations et la société civile sur le contenu de ce nouveau plan. Depuis la nomination de Roxana Maracineanu en tant que Secrétaire Générale de la MIPROF (Mission Interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains), une volonté de collaboration plus avant avec les associations a effectivement été initiée.

Au cours des 12 réunions de préparation qui se sont déroulées avant l’été, le Comité Protestant pour la Dignité Humaine a pu ainsi exprimer son point de vue sur la question du devoir de vigilance des entreprises et de leur importance dans la lutte contre la traite. Nous regrettons aujourd’hui que ce nouveau plan n’y fasse pas référence alors que c’était le cas dans le précédent plan et que la directive européenne à ce sujet est en cours de finalisation.

De façon notable, le 3e Plan National de lutte contre la traite prévoit la création d’un plan de formation national à destination de tous les professionnels en contact des victimes potentielles et avec des formateurs experts pluridisciplinaires.

Il devrait aussi créer un observatoire national de l’exploitation et la traite des êtres humains afin de mieux mesurer et quantifier l’ampleur du phénomène en France à l’aide de données statistiques fiables.

Concernant l’exploitation par le travail qui devient un des axes majeurs de la lutte contre la traite, et conformément à la future directive européenne sur le devoir de vigilance, les associations pourront se constituer partie civile pour toutes les infractions liées au travail dans le but de mieux accompagner les victimes lors de la procédure pénale.

Reprenant les articles 34 à 36 de la Convention internationale des droits de l’enfant, le Plan affirme la protection inconditionnelle des enfants contre les phénomènes de traite. Cela devrait se traduire par des campagnes de prévention et de sensibilisation dans les établissements scolaires et par la nomination de référents traite dans les académies ou les rectorats formés à la détection des victimes de traite.

Enfin, le Plan prévoit la création d’un Mécanisme National d’Identification, d’Orientation et de Protection des victimes (MNIOP). Attendu depuis 15 ans et faisant partie des obligations conventionnelles de la France, nous espérons que ce 3e Plan aboutira à l’adoption effective de ce mécanisme en collaboration avec les associations de terrain. 

En déclaration de bonnes intentions, la Ministre de l'Égalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l'Égalité des chances, Bérangère Couillard, s’était déjà exprimée sur la nécessité de prévenir et lutter contre les phénomènes de traite des êtres humains autour d’un événement comme les Jeux Olympiques 2024 à Paris.Le Plan se fait donc l’écho de cette volonté avec des actions de communication programmées dans les transports et des partenariats avec des plateformes d’hébergement. Dans cette ligne, la MIPROF a tenu à afficher son soutien au travail associatif réalisé à l’occasion des JO auquel le CPDH a participé.

En conclusion, ce 3e Plan National porte beaucoup d’espoir pour les victimes de traite et d’exploitation. Nous veillerons donc à sa bonne mise en œuvre pour la protection des victimes, et nous espérons des financements publics en conséquence. C’est un enjeu de dignité humaine, partout où des personnes sont exploitées, c’est notre humanité à tous qui est bafouée.