PMA avec tiers donneur : le Conseil d’Etat rejette deux recours

PMA avec tiers donneur : le Conseil d’Etat rejette deux recours
Publié le
June 27, 2024
PMA avec tiers donneur : le Conseil d’Etat rejette deux recours - Ancien donneur de gamètes lui-même, Frédéric Letellier est le Président de l’association Dons de gamètes solidaires (cf. « L’AMP avec tiers donneur n’est pas quelque chose d’anodin » ni pour les receveurs, ni pour le donneur). Il est également membre titulaire de la Commission d’Accès des Personnes nées d’une Assistance Médicale à la Procréation (AMP) aux Données des tiers Donneurs (CAPADD), et membre de groupes de travail de l’Agence de la biomédecine (ABM) sur le sujet. Il analyse pour Gènéthique la décision du Conseil d’Etat suite au recours qu’il avait fait auprès de la Haute Juridiction.

Gènéthique : Vous avez déposé un recours auprès du Conseil d’Etat. Quel est son objet ?

Frédéric Letellier : Pour être exact, j’ai déposé 2 recours en septembre et octobre 2022.

Le premier recours concerne l’arrêté du 29 août 2022 fixant le contenu du formulaire de consentement du tiers donneur à la communication de son identité et de ses données non identifiantes aux personnes majeures nées de son don. Depuis le 1er septembre 2022, il est nécessaire de signer ce formulaire de consentement pour réaliser un don de gamètes ou d’embryons. J’estime qu’il est important que le consentement des donneurs soit éclairé, et c’est la raison pour laquelle je demandais qu’il soit fait mention que le consentement est irrévocable. Je demandais également qu’il soit inscrit sur le formulaire que les modalités du droit d’accès aux origines sont susceptibles d’évoluer avec le temps (il se peut par exemple que dans le futur, les personnes issues d’un don aient accès aux données personnelles non directement identifiantes du donneur dès 14 ou 16 ans). Dans sa décision du 31 mai 2024, le Conseil d’Etat a rejeté ces demandes.

Alors que la loi prévoit un droit de rétractation de 14 jours en cas de signature d’un abonnement téléphonique par correspondance (Internet, téléphone ou voie postale), je m’étonnais qu’il n’y ait rien de tel de prévu pour les anciens donneurs qui sont sollicités par la CAPADD[1] pour signer le formulaire de consentement. Comme les anciens donneurs peuvent être très âgés (certains ont plus de 80 ans), je m’inquiétais que des donneurs signent ce formulaire de consentement sous le coup de l’intense émotion, puis regrettent leur décision quelques jours plus tard.

Pour que les personnes issues d’un don puissent obtenir l’identité du donneur, il faut que le donneur ait signé le formulaire de consentement, et également que le donneur ait renseigné le registre des dons de gamètes et d’embryons tenu par l’Agence de la biomédecine (ABM). Je demandais que, quand dans la loi il est fait mention du consentement du donneur, cela signifie que le donneur a signé le formulaire de consentement, et qu’il ait renseigné le registre de l’ABM. Le Conseil d’Etat a rejeté ma demande.

G : Et pour le second recours ?

FL : Le second recours concernait le décret n°2022-1187 du 25 août 2022 relatif à l’accès aux données non identifiantes et à l’identité du tiers donneur.

Mon objectif principal avec ce recours était de permettre aux anciens donneurs de s’opposer aux sollicitations de la CAPADD. Il faut savoir que quand la CAPADD est saisie d’une demande par une personne issue d’un don, elle n’a pas connaissance de l’identité de son donneur, et elle va donc contacter un centre de don pour obtenir l’identité du donneur. J’estimais que cette transmission de données entre le centre de don et la CAPADD ne respectait pas le RGPD compte tenu que le donneur n’avait pas la possibilité de s’y opposer. Le Conseil d’Etat a rejeté ma demande au motif que le RGPD permet de s’opposer à cette transmission de données. C’est donc une très bonne nouvelle puisque cela signifie que si un ancien donneur ne veut pas être sollicité par la CAPADD, il lui suffit d’écrire à son centre de don pour s’opposer à ce que ses données personnelles soient communiquées à la CAPADD.

Source : www.genethique.org

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Commentaire du CPDH

La loi de bioéthique comporte encore des impensés. Après la levée de l’anonymat pour les donneurs de gamètes et la possibilité d’accéder aux origines au cas par cas pour les enfants issus de dons avant la loi, c’est maintenant la question du décès du donneur et de la levée du secret médical qui est posée par cette Question Prioritaire de Constitutionnalité. Les enfants issus de dons challengent la loi pour aller vers un plus grand respect des droits fondamentaux et des droits de l’enfant en particulier, et c’est une très bonne chose. Nous souhaitons que leur souffrance soit entendue et prise en compte.

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