Loi Veil, de l'exception à la constitutionnalisation

Loi Veil, de l'exception à la constitutionnalisation
Publié le
April 16, 2024

Loi Veil, de l'exception à la constitutionnalisation - Le 8 mars 2024, « la liberté des femmes d’avoir recours à l’IVG » a été constitutionnalisée en France. Le 26 novembre prochain, la République fêtera les 50 ans du discours de Simone Veil devant l’Assemblée nationale, visant à « apporter une solution mesurée et humaine à un des problèmes les plus difficiles de notre temps ». Le problème : la grossesse non désirée en situation de détresse. La solution : l’avortement, auquel on donnera le nom d’Interruption volontaire de grossesse (IVG), afin de mieux rassurer ceux qui ne se sentaient pas à l’aise avec le mot « avortement ».

LE DISCOURS DE 1974

La rhétorique politique a toujours utilisé ce genre de litote pour rendre acceptable ce qui l’est difficilement, voire pas du tout. Le discours de Madame Veil avait d’ailleurs des accents rassurants : « Si la loi n’interdit plus, elle ne crée aucun droit à l’avortement. » L’enfer, nous le savons, est « pavé de bonnes intentions ». 50 ans après les promesses de Simone Veil, il nous a donc semblé intéressant d’examiner avec soin ces bonnes intentions et ces promesses que contenait le discours du 26 novembre 1974, de la ministre de la santé. L’heure du bilan a sonné afin de comprendre comment « l’exception d’avortement », votée pour cinq ans – on l’oublie souvent –, est devenue progressivement l’une des « valeurs de la République ». Notre réflexion s’appuiera sur les déclarations mêmes de Madame Veil ; elle qui affirmait en préambule de son célèbre discours : « Aucune femme ne recourt de gaieté de cœur à l’avortement, il suffit d’écouter les femmes ; c’est toujours un drame et cela restera toujours un drame. »

UNE DÉCISION GRAVE

« Les deux entretiens que la femme aura eus [avant une décision d’avortement], ainsi que le délai de réflexion de huit jours qui lui sera imposé, ont paru indispensables pour faire prendre conscience à la femme de ce qu’il ne s’agit pas d’un acte normal ou banal, mais d’une décision grave qui ne peut être prise sans avoir pesé les conséquences et qu’il convient d’éviter à tout prix. » C’est le 2 mars 2022 que le délai légal minimum de réflexion pour les femmes mineures comme pour les majeures sera supprimé. Presque 50 ans plus tard. En ce qui concerne les entretiens pré-IVG, la loi Guigou du 4 juillet 2001 en a supprimé le caractère obligatoire pour les femmes majeures. Cet entretien, ouvert aux hommes, devait permettre aussi un espace d’écoute et de dialogue en couple. Simone Veil avait d’ailleurs reconnu que « la décision d’IVG ne devrait pas être prise par la femme seule, mais aussi par son mari ou son compagnon ». Toutefois, « le gouvernement a estimé préférable de reconnaître qu’en définitive la décision ultime ne peut être prise que par la femme (…) Le gouvernement a choisi une solution marquant clairement la responsabilité de la femme parce qu’elle est plus dissuasive ». Vraiment ?

QUELQUES DONNÉES DÉMOGRAPHIQUES

« L’adoption du projet de loi n’aura que peu d’effet sur le niveau de natalité en France, les avortements légaux remplaçant en fait les avortements clandestins ». Selon l’Institut national d’études démographiques (INED), le nombre d’IVG pour 100 naissances était de 26,7 en 2013, il est monté à 34,6 en 2022, soit 234 300 avortements contre 678 000 naissances. Dans un contexte de taux de natalité élevé, Mme Veil aurait eu raison si la natalité n’avait pas diminué et le nombre d’IVG n’avait pas augmenté. Mais ce ne fut pas le cas, puisqu’on est passé de 208 325 avortements en 1990 à 234 300 en 2022 (source : drees.solidarites-sante.gouv.fr), et que l’indicateur conjoncturel de fécondité s’établit à 1,68 enfant par femme en 2023 alors qu’il était de 2,03 en 2010 (source : INSEE).

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