« La désobéissance civile des scientifiques est justifiée sur les plans éthique et pragmatique »

« La désobéissance civile des scientifiques est justifiée sur les plans éthique et pragmatique »
Publié le
October 3, 2022

« La désobéissance civile des scientifiques est justifiée sur les plans éthique et pragmatique » - Face à la gravité des crises qui menacent notre planète, les chercheurs Kévin Jean, Jérôme Santolini et Julia Steinberger expliquent, dans une tribune au « Monde », pourquoi les scientifiques peuvent légitimement recourir à la désobéissance civile.

L’image en a ébranlé plus d’un : le 6 avril, le climatologue américain Peter Kalmus, enchaîné à la porte d’une banque J.P. Morgan (premier investisseur dans les énergies fossiles), fond en larmes au cours d’un discours expliquant les motivations de son action. Devant le sentiment de voir les alertes scientifiques ignorées, il a décidé de s’engager dans une action de désobéissance civile. Dans les jours qui ont suivi, plus de mille deux cents scientifiques avaient participé à des actions de ce type dans vingt-six pays.

Depuis quelques années, la désobéissance civile est devenue un mode d’action auquel prennent part de plus en plus de scientifiques, en France comme ailleurs. Au point qu’il est devenu l’objet d’un nombre croissant de travaux académiques qui en ont interrogé la légitimité, les fondements éthiques, mais aussi l’efficacité.

En 2019, un article de la revue Lancet avait questionné les critères éthiques selon lesquels les actions de désobéissance civile de scientifiques pouvaient être légitimes.

En se basant sur la théorie de la justice de John Rawls (1921-2002), ses auteurs considèrent que cette tactique est justifiée dès lors qu’elle dénonce une situation injuste, si elle est utilisée en dernier recours, si elle est efficace, et si elle représente la forme d’action la moins dommageable compte tenu de la menace.

Des luttes plus fréquemment victorieuses

La question de l’injustice du dérèglement climatique est aisée à trancher, tant on sait que ce sont les moins responsables du problème qui en subiront les pires conséquences. La notion de dernier recours fait elle aussi peu débat, tant les formes de mobilisation classique semblent épuisées : rapports scientifiques s’accumulant, marches climat se succédant sans traduction politique, plaidoyer auprès des décideurs faisant un bien maigre poids face aux moyens colossaux des lobbys…

Source : lemonde.fr

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